Alors que certains, en ce temps de Noël souhaitent lancer sur la place publique une polémique autour de nos crèches, nous voudrions simplement vous faire partager ce que disait l’ancien archevêque, Mgr Raymond Bouchex à ce sujet :
« Dans nos églises comme dans la plupart de nos maisons, Noël ne va pas sans la crèche ».
La Provence est surtout célèbre pour ses crèches, petites ou grandes, où se pressent des santons de toutes les couleurs, dont certains sont de véritables chefs-d’oeuvre....
La crèche a une histoire très ancienne. Les chrétiens ont été, dès le début, tellement touchés par le mystère de la naissance de Jésus qu’ils ont tenu très tôt à matérialiser la dévotion qu’ils lui portaient. Qu’y-a-t-il de plus bouleversant que cette venue au monde, dans la simplicité et la pauvreté, de Celui qui est le Fils éternel du Dieu Tout-Puissant ? …
Le personnage essentiel de la crèche est un bébé. Mais ce bébé est plus grand que tous les grands de la terre, plus grand que l’empereur Auguste qui a ordonné le recensement, plus grand qu’Hérode et les gouverneurs du moment, plus grand que tous les rois de l’histoire, plus grands que toutes nos vedettes, si célèbrent soient-elles. Ce bébé est Celui que ni le ciel ni la terre ne peuvent contenir et qui pourtant est né dans une étable… Jésus est vraiment le personnage essentiel de la crèche, à tel point qu’une crèche peut très bien n’être faite que de l’Enfant Jésus couché dans la mangeoire…Mais la présence de Marie et Joseph nous montre que le Fils de Dieu a voulu devenir homme dans une famille. Elle nous rappelle la beauté des familles unies et stables.
Dans nos crèches , il y a en général beaucoup d’autres personnages : les bergers qui ont été les premiers avertis et invités ; des enfants, des hommes et des femmes portant les fruits du pays et les outils de leurs métiers. Avec eux est présente auprès de Jésus la vie quotidienne la plus ordinaire… Dans la crèche il y a aussi les animaux. Les animaux ne sont pas exclus de la proximité de Jésus. Il y a les moutons et les chiens des bergers. Il y a les chameaux, car comment les Rois Mages seraient-ils venus à travers le désert sans les chameaux ? Il y a l’âne et le boeuf. L’Evangile n’en parle pas. On les a ajoutés plus tard, en souvenir d’un texte du prophète Isaïe disant que l’âne et le boeuf reconnaissent leur maître tandis que les hommes ne reconnaissent pas leur Maître qui est Dieu (Is 1,3). L’âne et le boeuf sont représentés comme meilleurs que les hommes qui n’ont pas reçu Jésus. La nature elle-même est associée à la fête des hommes et des animaux : l’eau du moulin, la neige, les pins, les oliviers, les sapins, les étoiles et le ciel illuminé.
Naïveté que tout cela ? Souvent la naïveté comprend et dit la réalité invisible des personnes et des choses mieux que les arguments rationnels. Imagination pieuse ? Les Maîtres spirituels nous apprennent à nous servir de l’imagination pour méditer l’Evangile. Folklore ? Et si c’était une forme de ce que nous appelons l’inculturation, c’est-à-dire l’expression de la foi à travers les cultures diverses ?
La crèche, dans sa simplicité et sa beauté, ressemble aux miniatures anciennes qui ne remplacent pas, mais aident à regarder en même temps qu’à entendre l’Evangile de la Nativité. Elle est une manière pour nous de contempler le Mystère de la Nativité et d’en détailler toutes les richesses. Nous y découvrons l’amour fou de Dieu qui a envoyé son Fils, la foi et l’amour humbles et forts de Marie et de Joseph.
La présence de tous ces gens, pauvres ou riches, généreux ou mesquins, fraternels ou égoïstes, français ou étrangers, nous rappelle que Jésus est venu pour tous, qu’il a voulu être présent à notre vie la plus ordinaire, que devant lui le racisme ne tient pas, que nous sommes tous appelés à devenir saints (le mot « santoun » ne veut-il pas dire « petit saint » ?)….
La crèche de Noël est un exemple réussi de la religion populaire. Plus qu’une décoration gentille, elle est une catéchèse de l’essentiel de la foi chrétienne. Parents et grands-parents, menez vos enfants et petits-enfants visiter la crèche des églises. Faites avec eux une crèche à la maison. Aidez-les à connaître qui est le bébé qui attire tant de monde. Dites-leur que c’est pour eux et pour tous que cet enfant est là. Faites-leur comprendre que s’il n’était pas né, Noël n’existerait pas, ni ses chants, ni ses cadeaux, ni ses lumières, et que le monde serait plongé dans un froid glacial. Aidez-les à prier devant la crèche avec leurs gestes et leurs mots à eux. Regardez leurs yeux s’émerveiller…. La crèche, si nous le voulons, peut être un magnifique livre de catéchisme.
N’oublions pas, nous adultes, que la crèche a aussi quelque chose à dire à nos coeurs endurcis, blasés, marqués par la vie et le péché. Comme Jésus nous le demande, redevenons comme des enfants devant la crèche. Entendons-la nous murmurer l’amour de Dieu , amour éternel et toujours nouveau, passé et toujours actuel, souvent oublié par nous mais jamais oublié par lui ».
Extraits du livre de Mgr Raymond Bouchex, (archevêque d’Avignon 1978-2002) « Il a habité parmi nous. Entrer dans le mystère de l’incarnation »

